Le Harcèlement Moral.

DERNIERE MINUTE : LA LOI...

C'est nouveau, ça vient de sortir... La loi du 11 janvier 2001 de modernisation sociale, adoptée par l'Assemblée Nationale en première lecture et après déclaration d'urgence, comporte des articles concernant le harcèlement moral. Enfin il existe une légisation concernant le harcèlement moral. Elle est assez largement inspirée de la législation sur le harcèlement sexuel. Nous vous en livrons le texte ci-dessous. Vous retrouverez notre article après les textes.

Vous pouvez également consulter le résumé de deux arrêts de Cour d'appel sur ce sujet.



Chapitre III bis



Lutte contre le harcèlement moral au travail

[Division et intitulé nouveaux]

Article 50 ter (nouveau)

Après l'article L. 120-3 du code du travail, il est inséré un article L. 120-4 ainsi rédigé :

" Art. L. 120-4. - Le contrat de travail est exécuté de bonne foi. "

Article 50 quater (nouveau)

Après l'article L. 122-48 du même code, sont insérés trois articles ainsi rédigés :

" Art. L. 122-49. - Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral d'un employeur, de son représentant ou de toute personne abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions, qui ont pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité et de créer des conditions de travail humiliantes ou dégradantes. " Aucun salarié ne peut être sanctionné ni licencié pour avoir témoigné des agissements définis à l'alinéa précédent ou pour les avoir relatés. " Toute rupture du contrat de travail qui en résulterait, toute disposition ou tout acte contraire est nul de plein droit.

" Art. L. 122-50. - Est passible d'une sanction disciplinaire tout salarié ayant procédé aux agissements définis à l'article L. 122-49.

" Art. L. 122-51. - Il appartient au chef d'entreprise de prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les actes visés aux articles L. 122-49 et L. 122-50. "

Vous trouverez ici un article paru dans le quotidien "Libération" du 5 février 2001 concernant ce texte adopté par l'Assemblée Nationale.



**************



Pour des raisons tenant à la nature syndicale de notre site, nous n'évoquerons ici que le harcèlement moral au travail dans sa nature "verticale", c'est à dire mené par un supérieur hiérarchique. Ce dossier n'a pas vocation à être exhaustif, mais à vous livrer quelques éléments de réflexion sur ce sujet grave qui mérite de plus amples et plus techniques développements.

Le Harcèlement Moral, qu'est ce c'est ?

Le professeur allemand Heinz Leyman, précurseur à travers ses travaux menés sur ce sujet, dégage la définition suivante : "il s'agit de la répétition de un ou plusieurs agissements hostiles au moins une fois par semaine pendant au moins six mois".

L'avocat Paul Bouaziz propose comme définition, à titre provisoire, "tout comportement fautif de l'entreprise portant ou pouvant porter atteinte à la dignité du salarié et/ou à sa santé morale".

La psychiatre Marie-France Hirigoyen le décrit ainsi : "toute conduite abusive se manifestant notamment par des comportements ; des paroles, des actes, des gestes, des écrits, pouvant porter atteinte à la personnalité, à la dignité ou à l'intégrité physique ou psychique d'une personne, afin de mettre en péril l'emploi de celle-ci ou dégrader le climat de travail" Elle rajoute : "L'autre vous détruit, à force de petites choses".



Quelques signes tangibles de Harcèlement moral au travail.



Les agissements passifs d'abord : oublis de convocation à une réunion, ne plus se voir relayer certaines informations, ne plus être recensé dans l'annuaire de l'entreprise, fournitures de bureau arrivant en retard, oubli de transmettre les messages téléphoniques, etc…

Les agissements actifs : médisances, remise en cause systématique du travail, attaques directes, notes comminatoires, etc..

Ces agissements ont des objectifs (cumulatifs ou pas) :

Pour que l'on puisse parler de harcèlement, il faut que ces agissements soient répétitifs et qu'ils s'étalent dans la durée.

Dans quel but ?

Selon l'avocat travailliste Maître Philippe Ravisy, l'emploi de ces procédés douteux réside dans "un management à l'économie". Ce "processus d'usure psychologique" est mis en oeuvre lorsque le licenciement du salarié peut se révéler onéreux. On préfère ainsi acculer le salarié à la démission ou constituer un dossier pour 'justifier' un licenciement pour faute grave (et donc sans indemnités).



Profil de la victime.



Ce phénomène est loin d'être marginal, ainsi la Fondation Européenne pour les Conditions de Vie et de Travail, dans son enquête réalisée en 1996, relève un taux de 8% des actifs soumis à une forme d'intimidation ou de harcèlement moral, soit la bagatelle de 12 millions d'actifs européens…

Néanmoins, quelques profils de victimes peuvent être distingués :

les salariés anciens considérés comme trop bien payés (prime d'ancienneté, salaire plus élevé qu'un jeune embauché), voire moins productifs ; les femmes enceintes ; en cas de changement d'équipes dirigeantes, les cadres supérieurs. Autres catégories : tous ces salariés qui ne rentrent pas dans le moule de la flexibilité et de l'omerta de l'entreprise : cadre s'opposant à une décision qu'il pense mauvaise, salarié refusant de rester tard le soir pour dépanner, les syndicalistes, ainsi que, selon M.F Hirigoyen : "les grandes gueules ou les fortes personnalités . Et des gens qui s'investissent dans l'écoute de l'autre.".



Le Harceleur ?



Le harceleur a une grande force de conviction et sait inverser les rôles en se posant parfois même cyniquement en victime...de la victime.

Il représente souvent l'entreprise et tous ses rites. Sa position dominante rend son autorité difficilement discutable. Il peut même parfois développer des traits de pervers narcissique. Ces comportements sont exacerbés dans les entreprises où le culte de la productivité le pas sur le respect de la personne humaine et où elle devient une variable d'ajustement. (Maître Pierre Mairat indique que "c'est dans les entreprises du tertiaire que l'on rencontre le plus fréquemment les conduites abusives"). Ou alors être un manager maladroit, lui même stressé par sa hiérarchie, prenant sa facilité à élever la voix pour une qualité incontournable pour tenir ses objectifs. Le harceleur peut être un harcelé, se sentant obligé de reproduire les schémas brutaux qui lui sont appliqués.



Quelle riposte ? La résistance à l'oppression.



Tout d'abord tout noter (la chronologie des faits pourra être utile à votre défenseur), et ne pas hésiter à demander de l'aide au délégué du personnel, membre du CHSCT, à l'assistante sociale, à l'Inspecteur du travail.

L'Inspectrice du travail Agnès Solelhac, dans un colloque sur ce sujet, a souligné le rôle important des institutions représentatives du personnel.

Hormis ces conseils basiques, nous vous invitons à vous reporter à l'excellent ouvrage de Maître Philippe Ravisy "Le harcèlement moral au Travail", publié chez Delmas (85F), qui constitue à notre sens le premier ouvrage remède à ce fléau moderne du monde du travail Vous y trouverez des lettres types pour vous aider à bâtir votre dossier et des conseils juridiques. De même, vous pouvez consulter des décisions de jurisprudence ayant trait à ce sujet sur le site www.salaries.com.fr. Tout en vous rappelant que le harcèlement moral n'existe pas dans le Code du Travail. Néanmoins des biais existent, c'est toute l'intelligence du livre de Maître Ravisy que de les exposer clairement, y compris pour les profanes.

Quant à vous, n'hésitez pas à nous contacter en nous envoyant un e-mail